La vaccination contre l'herpesvirose et la calicivirose
Les chats sont fréquemment touchés par des maladies respiratoires infectieuses, surtout les chats vivant en communauté ou ayant des contacts avec des congénères. Cette maladie respiratoire, plus communément appelée « le coryza du chat », est multifactorielle et implique plusieurs agents pathogènes différents (1).
Dans 80% des cas, le coryza est causé par l’un de ces deux virus que sont l’herpèsvirus et le calicivirus (2). Le coryza peut également impliquer des bactéries comme Bordetella bronchiseptica ou Chlamydophila felis mais qui sont tout de même moins fréquents (1).
I. Présentation des maladies :
L'herpesvirose
L’herpesvirose ou rhinotrachéite virale féline est causée un Herpesvirus de type 1 (1), qui est de la même famille que le virus entraînant l’herpès buccal chez l’Homme. Il est aussi proche du virus de la varicelle.
L’herpesvirus félin touche la plupart des espèces de félidés (1). La transmission du virus se fait principalement par contact entre deux chats, par voie orale, nasale et oculaire (Figure 1) (2)
C’est un virus qui n’est pas très résistant dans le milieu extérieur et qu’on peut facilement détruire avec les désinfectants adaptés (1). Malgré cela, il est toujours possible qu’un chat infecté contamine l’environnement qui l’entoure via ses sécrétions nasales et oculaires, pouvant potentiellement contaminer un autre chat.
→ Comment le virus circule-t-il dans l’organisme ? (Figure 1)
Après contact avec le virus, celui-ci se réplique au sein de l’organisme infecté ce qui entraîne au bout de 2 à 6 jours une phase symptomatique où le chat est malade et contagieux car il excrète le virus via la bouche, le nez et les yeux (1).
La réponse immunitaire de l’animal se met en place et permet l’arrêt de l’excrétion virale et l’arrêt des signes cliniques. Mais le système immunitaire ne peut pas complètement éliminer le virus.
La plupart du temps, le virus devient « latent », c’est-à-dire qu’il s’installe dans l’organisme mais reste désactivé (2).
En cas de stress (lors d’une mise-bas ou d’un changement important dans l’environnement) ou d’immunodépression, le virus peut se réactiver, et le chat peut alors redevenir malade et potentiellement contagieux (2).
Figure 1 : Schéma de la transmission de l’herpesvirose
→ Quels sont les signes cliniques de l’herpesvirose ? (Figure 2)
Après une période d’incubation de 2 à 6 jours (1), l’animal va présenter :
- Des signes généraux (2) : hyperthermie, forte atteinte de l’état général (abattement, léthargie) avec anorexie associée
- Des signes respiratoires (2) : rhinopharyngite marquée (c’est-à-dire une inflammation des voies respiratoires supérieures) avec écoulements nasaux et oculaires, gêne respiratoire, éternuements, ptyalisme et difficultés à déglutir
- Des signes oculaires (2) : conjonctivite, kératite qui peut aller jusqu’à la formation d’un ulcère
- Dans les cas plus sévères, le chat peut développer de la toux ou peut présenter des difficultés à respirer (1)
Figure 2 : Signes cliniques de l’herpesvirose
En général, l’animal guérit spontanément en quelques jours et la mortalité est faible (1). Mais il y a des risques de complications au niveau des yeux principalement chez les chatons ou les adultes avec un système immunitaire peu performant (1).
Des surinfections bactériennes peuvent aussi se superposer à l’infection virale, pouvant entraîner une infection pulmonaire ou une infection au niveau des sinus (1).
Il faut garder en tête que le chat infecté par l’herpèsvirus durant sa croissance peut souffrir d’une forme chronique de l’herpesvirose, qu’on appelle couramment « coryza chronique » et qui est caractérisée par une rhinite suppurée chronique (1).
→ Comment traite-t-on l’herpesvirose ?
Comme nous l’avons dit, la plupart des animaux guérissent en quelques jours et un traitement n’est pas toujours nécessaire.
Généralement, on met en place seulement un traitement symptomatique (1) avec des traitements locaux au niveau des yeux et un rinçage des cavités nasales. On associe à ça du repos et des aliments très appétents pour stimuler la prise de nourriture car la perte de l’odorat peut limiter l’intérêt des chats pour les aliments Le chat malade ne sera pas hospitalisé sauf si son état le nécessite, car c’est un virus très contagieux. En cas de complication au niveau oculaire, on pourra utiliser des antibiotiques qui aideront à gérer les surinfections bactériennes. En complément, des traitements antiviraux (1) sont maintenant disponibles, soit applicables au niveau des yeux en cas d’infection oculaire, soit sous forme de comprimés pour lutter contre les infections longues et récidivantes.
La calicivirose
La calicivirose est causée par un virus de la famille des Caliciviridae, qui sont des virus ayant une forte variabilité génomique, ce qui signifie qu’ils sont sujets à de nombreuses mutations, il existe donc de nombreuses souches virales différentes (1).
La transmission du virus se fait par contact entre deux chats, par voie orale et nasale (1). Mais le virus de la calicivirose est très résistant dans le milieu extérieur (1), ainsi un chat peut s’infecter via l’environnement contaminé (Figure 3).
→ Comment le virus circule-t-il dans l’organisme ? (Figure 3)
Après infection, le virus se multiplie dans l’organisme ce qui va entraîner des signes cliniques. L’animal excrète alors le virus par voie orale et nasale. Cette excrétion continue même après guérison clinique, et peut durer jusqu’à 30 jours. Dans la plupart des cas, le système immunitaire va permettre de combattre le virus qui sera éliminé au bout d’un mois.
Mais dans 15 à 20% des cas, le virus ne pourra pas être éliminé complètement et l’animal sera porteur chronique de la maladie (1).
Figure 3 : Schéma de la transmission de la calicivirose
→ Quels sont les signes cliniques de la calicivirose ? (Figure 4)
La calicivirose peut entraîner 2 maladies différentes, une forme dite « classique » et une forme dite « grave ». En effet, différentes souches du virus circulent en France, ce qui conduit à différents types de symptômes. Il existe notamment des souches dites « hautement pathogènes » qui entrainent une forme très grave de la maladie (1).
Dans le cas de la forme classique (1) de la maladie, l’animal peut présenter différents symptômes en fonction de la souche virale :
- Des signes généraux : hyperthermie, anorexie et abattement, en général moins marqués que pour l’herpesvirose.
- Des signes buccaux : des vésicules au niveau de la muqueuse buccale qui peuvent se rompre, s’ulcérer et s’infecter.
- Des signes respiratoires : éternuements et écoulements nasaux, en général moins marqués que pour l’herpesvirose.
- Des signes oculaires : conjonctivite.
- Potentiellement des boiteries à cause d’une inflammation au niveau des articulations.
Dans la plupart des cas, cette maladie est bénigne et évolue vers la guérison en quelques jours sans aucune séquelle après un traitement symptomatique (1).
Figure 4 : Signes cliniques de la forme classique de la calicivirose
Pour la forme grave, on a dans ce cas-là une forte mortalité (1). On pourra également observer la présence de vésicules au niveau des muqueuses buccales et nasales. Le virus provoquera plus de signes cliniques et se diffusera plus largement, l’animal présentera une hyperthermie plus marquée, des œdèmes sous-cutanés, une dermatite. Le virus peut également atteindre d’autres organes comme les poumons ou le pancréas, et évoluer ensuite vers ce qu’on appelle une défaillance multi-organique ce qui entraîne la mort dans 30 à 50% des cas.
Il n’existe aucun traitement pour combattre directement le virus, on peut seulement proposer des traitements symptomatiques pour essayer de soulager l’animal (1).
Ces cas graves sont exceptionnels mais particulièrement dangereux, de plus le virus étant très contagieux, une épidémie peut rapidement se propager dans une clinique vétérinaire si des mesures hygiéniques strictes ne sont pas mises en place (1).
Il a aussi été prouvé que le calicivirus félin joue un rôle dans la gingivo-stomatite chronique féline (1), une maladie courante chez le chat et difficile à traiter. C’est une maladie qui entraîne une inflammation chronique de la cavité buccale qui peut altérer la qualité de vie. Cette maladie est causée par une réponse immunitaire inadaptée de la bouche du chat face à la présence de pathogènes comme le calicivirus.
II. Protocole de vaccination :
Quels sont les objectifs de la vaccination contre ces 2 maladies virales ?
- L’herpesvirus est un virus capable de rentrer en latence dans l’organisme, et de se réactiver en cas de stress ou d’immunodépression. Il a été montré que 80% des chats seraient déjà porteurs du virus lors de la vaccination. Ainsi, la vaccination n’a pas pour objectif de protéger contre l’infection, mais plutôt de limiter l’expression clinique de la maladie et l’excrétion du virus.
- Le calicivirus est un virus sujet aux mutations génétiques, il existe de nombreuses souches virales et notamment des souches hautement pathogènes très mortelles. Les vaccins contre le calicivirus ne permettent pas de protéger contre l’infection car certaines souches échappent à la vaccination. Ils ne permettent pas non plus de totalement supprimer l’apparition des signes cliniques de la maladie. La vaccination a en fait pour objectif de limiter la gravité des signes cliniques et l’importance de l’excrétion virale.
Ainsi, dans le cas de ces 2 virus, un animal vacciné peut quand même être porteur de ces virus et malade, mais la vaccination limite les symptômes, et limite également la transmission des virus à d’autres animaux (1). La vaccination a donc aussi un rôle collectif en protégeant les autres chats.
Quels sont les vaccins disponibles contre ces virus ? Différents types de vaccins peuvent être utilisés, certains à agent vivant, d’autres à agent inerte. Pour en savoir plus sur les différents types de vaccins, n’hésitez pas à visionner nos vidéos « Tout comprendre sur la vaccination« .
Quel est le protocole de vaccination à appliquer ? La vaccination contre ces maladies se fait grâce à un seul vaccin, avec un protocole unique (Figure 5) qui prend en compte les caractéristiques des 2 vaccins :
- Quand on commence la primovaccination chez un chaton de moins de 16 semaines, on considère que les anticorps de la mère sont toujours présents dans le sang du chaton, et comme pour la vaccination contre la parvovirose (consultez l’article sur la parvovirose pour tout comprendre sur les Anticorps d’Origine Maternelle), on ne sait pas quand le vaccin deviendra efficace. Ainsi, on répète la vaccination des chatons (3), toutes les 4 semaines dès l’âge de 8 semaines pour assurer la protection de tous. Une seule sera réellement efficace pour un chaton donné, mais on ne sait pas laquelle. La dernière injection se fait à 16 semaines, on considère en effet qu’après cet âge-là, 100% des chatons sont réceptifs à la vaccination.
- Quand on commence la primovaccination chez un chaton de plus de 16 semaines, cette fois-ci les anticorps maternels ne sont pas un problème. On va dans ce cas-là faire 2 injections avec 3 à 4 semaines d’intervalle entre les deux (4).
Pour tous les animaux, il est indispensable de faire un rappel un an après la primovaccination puis tous les ans pour garantir une protection toute la vie de l’animal (3).
Dans le cas d’un animal qui n’est pas à risque, c’est-à-dire n’ayant aucun accès à l’extérieur et aucun contact avec d’autres chats, il est désormais possible de réduire la vaccination à 1 injection tous les 3 ans (3). Le protocole de vaccination est à définir en fonction du mode de vie de l’animal et de la situation épidémiologique de son lieu de vie.
Figure 5 : Protocole de vaccination complet du chat
Pour plus d’informations, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire pour qu’il mette en place un protocole de vaccination adapté à votre animal.
D'autres articles qui pourraient vous intéresser :
La parvovirose féline, ou typhus, est une maladie virale fréquente et grave, particulièrement mortelle chez les chatons. La vaccination contre cette maladie est primordiale, quelque soit son mode de vie.
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La rage est une maladie zoonotique grave principalement transmise par les chiens. La France est indemne de rage mais la vaccination reste obligatoire pour voyager pour les chiens et les chats.
Bibliographie
(1) GREENE, Craig E. (éd.). Infectious diseases of the dog and cat. . 4th ed. St. Louis, Mo : Elsevier/Saunders, 2012, pp. 151-159. ISBN 978-1-4160-6130-4
(2) COSTES, Bérénice, VAN DEN BRANDEN, A., THIRY, Etienne et VANDERPLASSCHEN, Alain. L’herpèsvirus félin 1, l’agent de la rhinotrachéite virale féline. Annales de Médecine Vétérinaire. Université de Liège, 2007. pp. 61‑78.
(3) DAY, M. J., HORZINEK, M. C., SCHULTZ, R. D. et SQUIRES, R. A. WSAVA Guidelines for the vaccination of dogs and cats: WSAVA Vaccination Guidelines. Journal of Small Animal Practice. janvier 2016. Vol. 57, n° 1, pp. E1‑E45. DOI 10.1111/jsap.2_12431.
(4) STONE, Amy ES, BRUMMET, Gary O, CAROZZA, Ellen M, KASS, Philip H, PETERSEN, Ernest P, SYKES, Jane et WESTMAN, Mark E. 2020 AAHA/AAFP Feline Vaccination Guidelines. Journal of Feline Medicine and Surgery. septembre 2020. Vol. 22, n° 9, pp. 813‑830. DOI 10.1177/1098612X20941784.
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