Parasitologie du chat

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La toxoplasmose : quels risques pour la femme enceinte ?

La toxoplasmose est une maladie parasitaire touchant les chats, mais aussi les humains, et qui peut notamment avoir des conséquences très graves chez la femme enceinte. La toxoplasmose chez la femme enceinte est fréquemment associée aux chats, mais il faut savoir qu’en réalité, la présence d’un chat dans le foyer n’est pas le facteur de risque le plus majeur de toxoplasmose humaine.

I. Présentation de la maladie [1]

La toxoplasmose est une maladie infectieuse due à la multiplication du protozoaire Toxoplasma gondii dans l’organisme. 

Ce parasite peut réaliser 2 cycles évolutifs différents en fonction des espèces (Figure 1), ce qui permet de distinguer 2 maladies différentes :

  • La coccidiose toxoplasmique, affectant uniquement les chats : elle est causée par la multiplication du parasite dans les cellules du tube digestif d’un chat. Dans ce cas, le chat excrète des ookystes (des œufs) dans ses matières fécales. Ces œufs sont très résistants dans l’environnement et peuvent se déposer sur les aliments ou dans l’eau. Ils sont capables d’infecter par la suite d’autres chats, mais également d’autres mammifères et notamment les humains.
  • La toxoplasmose au sens strict, affectant de nombreuses espèces de mammifères et d’oiseaux, notamment les chats, les chiens et l’Homme. Dans ce cas-là, le parasite se multiplie dans de nombreuses cellules de l’organisme, et forme des kystes, notamment dans les muscles.

II. La toxoplasmose chez le chat [1]

Comme nous l’avons vu, le chat peut lui être affecté à la fois par la coccidiose toxoplasmique et la toxoplasmose. Comme représenté dans la figure 1, le chat peut s’infecter de 2 façons :

  • En ingérant des oeufs présents dans des aliments ou de l’eau contaminés
  • En ingérant de la viande crue contaminée par des kystes de toxoplasmose, donc par exemple en consommant un rongeur infecté

Le chat peut se contaminer dès le plus jeune âge, quand il commence à avoir un comportement de chasseur. 

Figure 1 : Cycle de la toxoplasmose chez le chat

Un chat infecté par la toxoplasmose le reste toute sa vie. Lors de sa première contamination, le chat excrète des œufs dans l’environnement pendant une période, puis le parasite forme ensuite des kystes dans les muscles. A ce moment-là, le chat ne produit plus d’œufs dans ses fèces. Mais le parasite est toujours présent dans son organisme, et la production d’œufs pourra recommencer plusieurs fois dans sa vie, notamment lors d’une immunodépression transitoire. 

Le chat représente donc une source récurrente de dissémination d’œufs dans l’environnement

La prévalence mondiale de la toxoplasmose chez le chat est de 30 à 40%, ce qui veut dire que 30 à 40% des chats dans le monde sont infectés et libèrent pendant certaines périodes de leur vie des œufs dans l’environnement [2]. 

→ Les chats ayant accès à l’extérieur peuvent être plus facilement en contact avec des œufs dans l’environnement. Leur comportement de chasseur les prédispose aussi, car ils consomment alors de la viande crue.

→ Pour un chat d’appartement ou d’extérieur, une alimentation à base de viande crue ou peu cuite est un facteur de risque d’infection.

→ Les chats vivant en appartement sans accès à l’extérieur et étant nourris avec une alimentation industrielle (donc de la viande bien cuite) sont beaucoup moins à risque d’être contaminés par la toxoplasmose. 

Un chat infecté assez jeune ne présente généralement aucun symptôme

→ Si l’infection survient chez une chatte gestante, le parasite peut franchir la barrière placentaire, ce qui contamine le fœtus et peut induire des avortements ou des malformations.

→ Certains chats, infectés à l’âge adulte, peuvent présenter des signes cliniques, avec plusieurs formes de la maladie :

  • des formes respiratoires avec une bronchopneumonie
  • des formes nerveuses avec des convulsions, des crises d’épilepsie ou de la paralysie.
 

Il existe une molécule spécifique qui permet de stopper la multiplication du parasite et qui doit être administrée 2 à 4 fois par jour pendant 4 à 6 semaines. En fonction des signes cliniques du chat, on pourra aussi avoir une prise en charge complémentaire.

Chez le chat, il est difficile de prévenir une infection, surtout chez les chats ayant accès à l’extérieur, et pouvant donc se contaminer très facilement dans l’environnement ou en chassant des souris. Comme la toxoplasmose n’induit quasiment jamais de signes cliniques chez le chat, l’absence de prévention ne constitue pas un réel problème.

Par contre, chez l’Homme, de multiples mesures de prévention existent, car la maladie peut être bien plus grave. Regardons maintenant ce qu’est la toxoplasmose humaine et comment la prévenir.

III. La toxoplasmose chez l'Homme

La toxoplasmose est une zoonose majeure. En Europe, on estime la prévalence de la toxoplasmose de 10% à plus de 50% en fonction des pays. En France, on estime que 30 à 60% des adultes sont immunisés contre la toxoplasmose (cela signifie qu’ils ont déjà rencontré le parasite une fois dans leur vie) [1].

L’homme peut se contaminer de deux façons (Figure 2) :

  • Par la consommation de viande crue ou peu cuite qui contient des kystes de toxoplasmose. En Europe, la source principale de contamination est l’agneau. 
  • Par ingestion d’oeufs de toxoplasmose présents dans l’environnement, notamment dans des végétaux contaminés (fruits et légumes), dans la litière de chat et exceptionnellement dans le pelage du chat.

Après contamination, le parasite de la toxoplasmose reste présent dans le corps sous forme de kystes dans les muscles pendant des années, mais n’entraîne plus de symptôme car il est sous forme inactivée.

Figure 2 : Cycle général du parasite

On estime que la contamination par ingestion de viande crue ou peu cuite contaminée par des kystes est la voie de contamination la plus fréquente par rapport à l’ingestion d’oeufs.

Pour appuyer cela, un rapport publié en 2010 [3] permet de recenser les épisodes de cas groupés (cela signifie que plusieurs personnes ont été touchées par la toxoplasmose au même moment) de toxoplasmose depuis 1965. Parmi les 20 épisodes recensés :

  • Pour 1 épisode (5%), l’origine de la contamination n’a pas été démontré
  • Pour 3 épisodes (15%), les contaminations venaient de la présence d’oeufs dans de l’eau
  • Pour 3 épisodes (15%), les contaminations ont été causées par la présence d’oeufs dans le foyer à cause de la présence d’un chat
  • Pour les 13 épisodes restants (65%), la contamination provenait de l’ingestion de viande crue ou peu cuite. Ces épisodes étaient le plus souvent liés à la consommation d’agneau ou de mouton, mais aussi parfois de boeuf, de porc ou de gibier

La toxoplasmose n’induit généralement aucun signe clinique chez un humain adulte en bonne santé. Les risques de cette maladie sont surtout pour les femmes enceintes ou les personnes immunodéprimées [2].

→ Quels risques chez les personnes immunodéprimées ? [4]

Les personnes immunodéprimées, par exemple infectées par le VIH (SIDA humain), ont des défenses immunitaires diminuées. Une infection par la toxoplasmose peut induire des complications importantes, notamment :

  • une atteinte cérébrale qui va entraîner une fièvre intense, des maux de têtes importants, des crises d’épilepsie et potentiellement des paralysies de certaines zones du corps. 
  • une choriorétinite, qui est une inflammation au niveau de l’œil qui va entraîner une baisse de la vision

→ Quels risques pour le fœtus ? [4][1]

Si une femme qui n’a encore jamais été infectée par la toxoplasmose se contamine lors de sa grossesse, le parasite peut être transmis au fœtus via le placenta : on parle alors de toxoplasmose congénitale. Les conséquences dépendent alors du stade de la grossesse :

  • Au cours du premier trimestre, l’infection peut causer ce qu’on appelle une méningo-encéphalite toxoplasmique, ce qui peut avoir plusieurs conséquences pour le fœtus : macrocéphalie, hydrocéphalie, troubles nerveux et oculaires. On pourra alors avoir des accouchements prématurés, ou des morts in-utéro.
  • Pendant le deuxième et le troisième trimestre, le fœtus peut subir des retards de développement, ou une choriorétinite (inflammation de l’œil qui aura des conséquences sur la vision chez l’enfant). 

La toxoplasmose congénitale peut être latente, c’est-à-dire que le bébé naît sans aucun déficit, mais il peut présenter des troubles oculaires ou nerveux au cours de sa vie. 

La toxoplasmose congénitale survient pour des fœtus dont la mère n’a encore jamais été infectée par la toxoplasmose, et qui s’infecte durant sa grossesse. 

En effet, une femme enceinte qui a déjà rencontré le parasite avant sa grossesse a encore le parasite dans son organisme, mais qui est sous forme inactivée et ne peut pas être transmis au foetus. 

C’est pour cette raison qu’en France, une femme enceinte doit subir un test sérologique de dépistage au tout début de sa grossesse :

→ Si celui-ci est positif, cela signifie que la future mère a déjà rencontré le parasite avant sa grossesse, et dans ce cas-là le parasite est certes potentiellement encore présent dans son organisme, mais il ne peut pas être transmis au fœtus. La grossesse ne sera alors pas à risque.

→ Si celui-ci est négatif, cela signifie que la future mère n’a encore jamais rencontré le parasite. Dans ce cas-là, un suivi sera nécessaire, pour s’assurer qu’elle ne rencontre pas le parasite pendant sa grossesse. On fait alors des suivis sérologiques mensuels, et de nombreux conseils de prévention peuvent être donnés pour éviter une contamination du fœtus.

Dans tous les cas, il faut garder en tête que des cas exceptionnels de toxoplasmose congénitale ont pu être observées chez les femmes enceintes séropositives. Ainsi, les mesures de prévention doivent être appliquées pour toutes les femmes enceintes. 

Pour prévenir une infection pendant la grossesse, plusieurs conseils sont à appliquer [2] :

  • La source de contamination principale est l’ingestion de viande crue ou peu cuite [3]. La viande doit donc être bien cuite, ou avoir subi une congélation à -20°C pendant au moins 48h.
  • Il faut laver soigneusement les fruits et les légumes, et éviter de manger des crudités (surtout en dehors de la maison, quand on ne sait pas si le lavage a été correctement réalisé).
  • Il faut se laver les mains après avoir manipulé des fruits, des légumes ou de la viande crue, ou après avoir par exemple passé du temps à jardiner ou manipuler de la terre
  • Il faut penser à bien nettoyer les ustensiles de cuisine après avoir découpé de la viande.

 

Pour les personnes ayant un chat à la maison, il ne faut pas tout de suite s’imaginer qu’il faut se séparer de son chat. Nous avons bien vu que la contamination par l’intermédiaire du chat est moindre par rapport à l’ingestion de viande crue ou de légumes mal lavés. Cependant, on peut instaurer des mesures préventives pendant la durée de la grossesse [2] :

  • Il faut éviter le contact avec les selles du chat. Soit on laisse un autre membre de la famille manipuler la litière, ou alors on porte des gants.
  • On pense à nettoyer quotidiennement la litière pour éviter que les œufs deviennent contaminants. 
  • On se nettoie soigneusement les mains après chaque manipulation de la litière.
  • Il faut éviter les contacts trop rapprochés avec le chat, notamment en évitant que celui-ci dorme dans le lit par exemple, et en se lavant régulièrement les mains après avoir caressé le chat.
  • Il faut éviter que le chat puisse avoir des contacts avec la nourriture.
  • On peut aussi éviter de donner de la viande crue ou peu cuite à son chat et limiter son comportement de chasseur en extérieur pendant la durée de la grossesse pour limiter le risque qu’il se contamine et qu’il puisse ensuite contaminer l’environnement à son tour.
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Les chats sont fréquemment touchés par des maladies respiratoires infectieuses. Cette maladie, plus communément appelée “le coryza du chat”, est multifactorielle et implique plusieurs agents pathogènes différents.

La leucose féline est une maladie virale grave et incurable. C’est une maladie qui se transmet par échange de salive, et qui touche donc surtout les chats ayant accès à l’extérieur. Chez ces chats, la vaccination contre cette maladie est alors essentielle.

La rage est une maladie zoonotique grave principalement transmise par les chiens. La France est indemne de rage mais la vaccination reste obligatoire pour voyager pour les chiens et les chats.

 

Bibliographie

[1] F. Beugnet, G. Miro, L. Halos, and J. Guillot, Abrégé de parasitologie clinique du chien et du chat. 2021.

[2] ‘Toxoplasmose et santé publique’, ESCCAP France. https://www.esccap.fr/sante-publique/toxoplasmose-risque-enceinte-grossesse.html (accessed Oct. 03, 2022).

[3] M. Ginsbourger, A. Guinard, C. Midi-Pyrénées, and I. Villena, ‘Toxi-infection alimentaire collective à Toxoplasma gondii liée à la consommation d’agneau Aveyron, novembre 2010’, p. 16.

[4] ‘Reconnaître la toxoplasmose’. https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/toxoplasmose/definition-symptomes-complications-possibles (accessed Oct. 03, 2022).

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