La vaccination contre la leucose féline
La leucose féline est une maladie virale grave et incurable qui était très fréquente en France il y a quelques années, et qui est aujourd’hui en régression grâce aux dépistages massifs réalisés sur les populations à risque et grâce à la vaccination. C’est une maladie qui se transmet principalement entre des chats vivant en communauté et ayant de nombreux contacts avec des congénères. Chez ces chats, la vaccination contre la maladie est alors essentielle.
I. Présentation de la maladie
Comment se transmet la leucose ?
La leucose féline est provoquée par le virus leucémogène félin (FeLV) qui appartient à la famille des Rétrovirus (1). C’est un virus qu’on qualifie d’oncovirus, le préfixe “onco-” faisant référence à la capacité du virus à entrainer des tumeurs dans l’organisme infecté.
C’est un virus peu résistant dans l’environnement (1). La caractéristique principale des Rétrovirus est leur capacité à intégrer leur ADN dans le génome de la cellule qu’ils ont infecté (1).
Ce virus affecte les chats mais aussi les félins sauvages de manière générale (1). La transmission du virus se fait via la salive (Figure 1) (1). Ainsi, les chats vivant en communauté ou avec des contacts avec de nombreux chats sont considérés les plus à risque. En effet, la contamination pourra avoir lieu lors de contacts sociaux (toilette mutuelle, partage d’une gamelle) ou belliqueux (morsures et griffures) entre chats (1). Une femelle infectée par le FeLV pourra potentiellement transmettre la maladie à ses chatons via le placenta pendant la gestation ou via le lait pendant la lactation (1).
Figure 1 : Transmission de la leucose féline
Dans la population générale, la prévalence de l’infection est de 1% seulement. Mais dans les populations à risque (chats vivant en communauté), cette prévalence augmente fortement (1), c’est une maladie qui est donc à ne pas négliger pour des chats vivant en extérieur et pouvant avoir des contacts avec des chats errants notamment.
Que devient le virus une fois dans l'organisme ?
La pathogénie de la leucose féline est assez compliquée. L’animal s’infecte par voie oro-nasale (1) par contact avec la salive d’un chat infecté. Une fois le virus installé au niveau de l’oropharynx, il y a deux possibilités :
→ Soit le virus ne parvient pas à se multiplier : on parle d’infection abortive (1)
→ Soit le virus survit et va se multiplier intensément dans les glandes salivaires et les organes lymphoïdes, entraînant une virémie. À nouveau, deux cas de figure se présentent :
- Soit le système immunitaire de l’animal parvient à vaincre le virus : on parle d’infection régressive (1)
- Soit le virus n’est pas éliminé et continue à se répliquer et finit par atteindre la moelle osseuse. A ce stade-là, deux options sont possibles :
- Soit le virus continue sa progression et sa réplication : on parle d’infection progressive
- Soit le virus arrête de se répliquer mais reste présent dans l’organisme : on parle d’infection latente (1)
Dans ce dernier cas, l’animal n’est plus contagieux car le virus ne circule plus dans son sang, mais il reste présent dans le génome de l’animal sous forme désactivée. En cas de stress important ou d’immunodépression, le virus peut se réactiver (1), on repasse alors dans le cas d’une infection progressive avec un animal contagieux et potentiellement malade.
Figure 2 : Circulation du virus dans l’organisme
Quels sont les signes cliniques de la leucose ?
Les signes cliniques de la leucose féline n’apparaîtront que pour des animaux subissant une infection progressive, c’est-à-dire des chats dont le système immunitaire n’a pas réussi à vaincre le virus et celui-ci s’est installé au niveau de la moelle osseuse.
L’évolution de la maladie est assez lente mais la mortalité est importante. Il a été montré que le taux de mortalité pour des chats ayant une infection progressive est de 50% au bout de 2 ans, et de 80% au bout de 3 ans (1).
On considère donc généralement qu’un chat ayant une infection progressive mais n’ayant pas encore de symptômes de la maladie a une moyenne de survie de 2 ans environ (1). Mais malgré le fait que ce soit une maladie incurable, il existe aujourd’hui de nombreux soins permettant d’apporter une bonne qualité de vie aux animaux.
La maladie se manifeste principalement par (1) :
- Une immunodéficience : C’est un virus qui entraîne un malfonctionnement du système immunitaire, les chats touchés sont donc plus sensibles aux infections, qui seront plus sévères et plus difficiles à traiter.
- Des affections à médiation immune : ce sont des affections où le système immunitaire va s’attaquer aux cellules de l’animal. On peut avoir par exemple une anémie à médiation immune (le système immunitaire détruit les cellules sanguines), ou une glomérulonéphrite (le système immunitaire s’attaque aux cellules permettant le fonctionnement des reins).
- Des tumeurs comme des leucémies ou des lymphomes.
Comment traite-t-on la leucose ?
Il n’existe malheureusement aucun traitement permettant de combattre directement le virus.
Mais on pourra apporter des soins à l’animal pour lui apporter la meilleure qualité de vie possible.
Comme ça a été dit précédemment, ce sont des animaux qui vont être plus sensibles aux infections par des maladies mais aussi aux infestations par des parasites (1). Voici quelques exemples de mesures à prendre :
- On le traite contre les parasites externes et internes.
- On fait attention à l’alimentation (on évite les aliments crus qui pourraient apporter des parasites).
- On le protège contre les autres maladies infectieuses en suivant bien le planning de vaccination (sauf s’il présente une immunodéficience, dans ce cas-là la vaccination sera déconseillée).
En cas d’affection tumorale, la chimiothérapie est une option en fonction de la nature de la tumeur, mais l’espérance de vie de l’animal diminue fortement.
II. Protocole de vaccination
La prévention de cette maladie incurable passe uniquement par le dépistage et la vaccination.
La vaccination contre la leucose féline n’a pas pour objectif de protéger contre l’infection. Elle a pour objectif de forcer le virus à se mettre en latence et à le rester tout au long de la vie de l’animal. Ainsi, un animal vacciné peut quand même être infecté par le virus au cours de sa vie mais ne développera pas la maladie si le protocole de vaccination est correct.
La vaccination est par contre inutile chez un animal déjà infecté présentant une virémie avec des signes cliniques. Cet animal est contagieux et la vaccination n’y changera rien car le virus est déjà installé.
La vaccination est donc précédée d’un test de dépistage (Figure 3) sur les animaux (1) :
- qui présentent des signes cliniques évoquant la leucose
- qui vivent en groupe avec des animaux de statut inconnus
- qui ont un passé inconnu
Ce test de dépistage peut être réalisé assez facilement chez un vétérinaire avec quelques gouttes de sang.
→ Si le test de dépistage est positif, un nouveau test pourra être réalisé quelques semaines plus tard (1) pour voir si le système immunitaire de l’animal a permis de vaincre le virus (infection régressive) ou si l’infection est progressive. En cas d’infection progressive, la vaccination est inutile et n’a aucune vertu thérapeutique. L’animal contaminé et contagieux devra alors être isolé au mieux. Si l’isolement est impossible, on conseille généralement la stérilisation de l’animal pour limiter les comportements agressifs et limiter ainsi les risques de contamination à d’autres chats.
→ Si le test de dépistage est bien négatif, on proposera la vaccination si le mode de vie de l’animal est considéré comme à risque (accès à l’extérieur, vie en communauté).
Figure 3 : Dépistage de la leucose féline
Les vaccins disponibles sont des vaccins à agent inerte. Pour tout comprendre sur les différents types de vaccin, n’hésitez pas à visionner nos vidéos « Tout comprendre sur la vaccination« . Le vaccin est donc peu immunogène. Ainsi, le protocole de vaccination nécessite plus de rappels pour avoir une bonne réponse immunitaire.
Contrairement aux vaccins à agent vivant, il n’y ici pour les chatons aucune interférence entre les anticorps du vaccin et les anticorps de la mère (voir article sur la parvovirose) car le fonctionnement du vaccin est différent.
- La primo-vaccination se fait chez les chatons à partir de l’âge de 8 semaines, et se déroule en 2 injections à 3-4 semaines d’écart (Figure 4) (2, 3)
- Les rappels de vaccination sont ensuite réalisés chaque année (2, 3) pour la plupart des vaccins sur le marché (certains vaccins peuvent être réalisés tous les 3 ans) (Figure 4)
Figure 4 : Protocole de vaccination complet du chat
Pour plus d’informations, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire pour qu’il mette en place un protocole de vaccination adapté à votre animal.
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Bibliographie
(1) GREENE, Craig E. (éd.). Infectious diseases of the dog and cat. . 4th ed. St. Louis, Mo : Elsevier/Saunders, 2012, pp. 108-136. ISBN 978-1-4160-6130-4.
(2) DAY, M. J., HORZINEK, M. C., SCHULTZ, R. D. et SQUIRES, R. A. WSAVA Guidelines for the vaccination of dogs and cats: WSAVA Vaccination Guidelines. Journal of Small Animal Practice. janvier 2016. Vol. 57, n° 1, pp. E1‑E45. DOI 10.1111/jsap.2_12431.
(3) STONE, Amy ES, BRUMMET, Gary O, CAROZZA, Ellen M, KASS, Philip H, PETERSEN, Ernest P, SYKES, Jane et WESTMAN, Mark E. 2020 AAHA/AAFP Feline Vaccination Guidelines. Journal of Feline Medicine and Surgery. septembre 2020. Vol. 22, n° 9, pp. 813‑830. DOI 10.1177/1098612X20941784.
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