Vaccination du chien

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La vaccination contre la Leptospirose

Introduction

La leptospirose canine est une maladie infectieuse d’origine bactérienne (contrairement aux maladies virales contre lesquelles on vaccine également couramment les chiens (article disponible ici). Cette maladie est grave car elle peut être mortelle pour le chien mais c’est aussi une maladie zoonotique.

Présentation de la bactérie :
La leptospirose est causée par une bactérie du genre Leptospira. Dans le monde, plus de 250 souches différentes classées en sérogroupes ont été décrites avec au moins 10 sérogroupes qui concernent les chiens et les chats. (1) Cependant, bien qu’on retrouve des anticorps contre cette bactérie dans la population féline, il est extrêmement rare qu’ils présentent des signes cliniques de leptospirose.

Présentation du pathogène et modes de transmission :
Les hôtes vecteurs de la maladie sont nombreux : ce sont essentiellement les rongeurs, les mustélidés mais aussi les canidés et les ruminants. Les leptospires sont transmises (Figure 1) entre individus de manière directe via l’urine, des rapports sexuels, des morsures ou l’ingestion de tissus infectés ou de manière indirecte via un environnement infecté (eau, sol, nourriture). Ainsi il suffit d’une baignade dans un lac où des animaux infectés (rats, chiens, …) ont uriné pour contaminer un chien. Les animaux contaminés peuvent excréter les bactéries dans leurs urines pendant des mois après le début de l’infection. (1)

Figure 1 : Schéma de la transmission de la Leptospirose

Il existe des facteurs de risques :

  • Vie en zone suburbaine à urbaine (prolifération de rongeurs et de chiens)
  • Contact avec les hôtes vecteurs (par ex: les chiens de chasse sont plus facilement directement en contact avec la faune sauvage potentiellement infectée)
  • La proximité de zones humides et marécageuses dont l’eau peut être contaminée
  • Le printemps et l’automne sont les périodes les plus à risque car elles offrent les conditions les plus propices à la survie de la bactérie (Figure 2)
Figure 2 : Graphique mensuel des cas de Leptospirose diagnostiqués entre 2009 et 2014 à l’ENVT (2)

Circulation du virus dans l’organisme et conséquences :
La bactérie est mobile, elle peut donc se déplacer facilement au sein de l’organisme via la circulation sanguine ce qui favorise sa dissémination. Le rein et le foie étant des organes de filtration du sang, ils sont en général atteints plus précocément. On notera aussi que le système nerveux central, les yeux, l’appareil génital ou encore l’appareil respiratoire peuvent être le siège d’une infection et d’une contamination importante.

La gravité de la maladie va dépendre :

  • du nombre de bactéries infectantes
  • du sérotype infectant : on pense que certains sérotypes ont une spécificité clinique
  • de la réponse immunitaire qui va être mise en place par l’organisme infecté : cela dépend notamment de la précocité de la réponse, très variable d’un animal à l’autre selon s’il a déjà été exposé, vacciné ou non contre la maladie. Dans ce dernier cas, le système immunitaire va alors permettre une limitation de l’expansion de la maladie.

Signes cliniques :

Figure 3 : Signes cliniques pouvant être dus à la Leptospirose

Les principales lésions sont : une vasculite, une insuffisance rénale aiguë, une insuffisance hépatique aiguë, des uvéites , des méningites.
Cela cause dans un premier temps de la fièvre, de l’abattement, de l’anorexie. Puis une augmentation de la quantité d’urine émise et de la prise de boisson, des vomissements, de la diarrhée, de l’ictère “flamboyant”, pétéchies , douleurs abdominales.
L’animal peut mourir très rapidement en cas de forme suraiguë.

Pronostic :
On observe chez les animaux diagnostiqués positifs à la leptospirose un taux de survie de 60 à 80% (3), mais il faut une suspicion rapide et un traitement efficace. Par contre, parmi ceux qui ont eu une forme rénale aiguë, on a 45% de séquelles de type MRC (Maladie Rénale Chronique) entre 6 et 12 mois après, qui sont également la cause de mortalité de l’animal dans les années qui suivent. Il faut donc réaliser un suivi au long terme.

Traitement :
On commence un traitement antibiotique complexe dès la suspicion clinique pour combattre la bactérie puis on fait un traitement de soutien pour aider l’animal à survivre malgré ses symptômes. (1)

Gestion du risque zoonotique :
La transmission se fait par contact indirect. Il faut donc appliquer de bonnes pratiques hygiéniques notamment en portant des gants et en se lavant les mains après tout contact avec l’animal.
La gestion des urines est un point critique puisque c’est le milieu biologique n°1 pour la transmission. Il faut donc identifier une zone restreinte où l’animal est amené systématiquement pour uriner. On va ensuite très rapidement inactiver les bactéries sur cette zone en l’arrosant avec de la javel diluée à 10%.
On surveille les autres animaux et éventuellement les personnes qui auraient pu être mises en contact avec les urines contaminées de l’animal. On évitera pendant un temps les zones humides.

Chez l’homme, la maladie est souvent bénigne, mais peut conduire à l’insuffisance rénale, voire à la mort dans 5 à 20% des cas. (4)

La vaccination n’empêche pas l’animal d’attraper la leptospirose mais lui permet d’avoir une forme moins grave, qui nous permettra de la diagnostiquer suffisamment tôt pour la prendre en charge rapidement et ainsi diminuer nettement le risque de mort. De plus, elle limite fortement l’excrétion des leptospires et donc diminue la contamination animale, humaine et environnementale par l’animal malade vacciné.(5)

Les vaccins qui sont disponibles en France sont des vaccins inactivés. En Europe on a des vaccins soit :

  • bivalent L2 (protège contre deux souches : Leptospirosa canicola et icterohemorrhagiae ) donc protègent contre les sérogroupes IH et CAN.
  • trivalent L3 (Lesptospirosa canicola, icterohemorrhagiae et grippotyphosa) donc protègent contre les sérogroupes IH, CAN et GRI.
  • quadrivalent L4 (Leptospirosa canicola, icterohemorrhagiae , australis et grippotyphosa) donc protègent contre les sérogroupes IH, CAN, GRI et AUS.

Aux USA, les différentes souches contre lesquelles on vaccine ne sont pas les mêmes car les développements des vaccins sont basés sur des études épidémiologiques (6). Ainsi, Leptospira canicola, L. icterohaemorrhagiae et L. australis sont présentes en France et en Europe, alors que L. grippotyphosa est plus rare.

Il n’y a pas de protection croisée complète donc il y a toujours un risque que l’animal développe une leptospirose due à des sérovars d’autres sérogroupes car il existe une dizaine de sérogroupes différents en France. Cependant il atténue quand même les signes cliniques, limitant ainsi le risque de mort brutale de l’animal à cause d’une forme suraiguë.

Le choix du vaccin (L2, L3 ou L4) se fait en fonction du contexte épidémiologique. L’intérêt du vaccin L3 est donc discutable car L. grippotyphosa est plus rare en France et en Europe.

Une étude récente a montré que 26 % des rats piégés en zone urbaine lyonnaise étaient porteurs de leptospires du sérogroupe IH. (7) De plus, une autre étude a montré que les deux sérogroupes GRI et AUS représentaient 72 % des cas de leptospirose clinique du chien (en excluant les sérogroupes IH et CAN qui sont majoritaires), avec 63 % pour le sérogroupe AUS

Figure 4 : Distribution des sérogroupes de leptospires chez 232 chiens suspects de leptospirose clinique, à l’exclusion des sérogroupes IH et CAN (adapté d’après Ayral et coll., 2014 (6))

A cela s’ajoutent les bons résultats obtenus avec les vaccins L2 depuis leur utilisation dans les années 70 pour protéger contre les sérogroupes IH et CAN. Les vaccins L4 (disponibles depuis 2014) sont donc les vaccins les plus adaptés à la situation épidémiologique actuelle car protégeant contre 4 souches.

Protocole (Figure 5) : Ce sont des vaccins inactivés, faiblement immunogènes et ne posent donc aucun problème d’interaction avec les AOM contrairement aux vaccins présentés dans cet article (cliquez ici pour le consulter). Mais cela impose des rappels annuels. La primo-vaccination se réalise en deux injections quelque soit l’âge de l’animal et peut être commencé à partir de 8-10 semaines, et la deuxième injection a lieu 2 à 4 semaines plus tard. (8)

Prévention : D’autres mesures de prophylaxie peuvent être mise en place pour limiter le risque de Leptospirose :

  • contrôler les populations de rongeurs,
  • éviter les zones à risque en limitant ou supprimant les balades en zones humides et les lacs en automne et printemps, ainsi que l’abreuvement en eaux stagnantes.
Protocole de vaccination du chien

Figure 5 : Protocole de vaccination du chien

Pour plus d’informations, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire pour qu’il mette en place un protocole de vaccination adapté à votre animal.
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Bibliographie

1. GREENE, Craig E. (éd.). Infectious diseases of the dog and cat. . 4th ed. St. Louis, Mo : Elsevier/Saunders, 2012. ISBN 978-1-4160-6130-4. SF991 .I54 2012

2. DULER, Laëtitia. Étude rétrospective des cas de leptospirose canine de l’ENVT entre 2009 et 2014. . pp. 131.

3. HABUŠ, Josipa, POLJAK, Zvonimir, ŠTRITOF, Zrinka, PERKO, Vesna Mojčec, MILAS, Zoran, PERHARIĆ, Matko, MARTINKOVIĆ, Krešimir, HAĐINA, Suzana, STEVANOVIĆ, Vladimir, STAREŠINA, Vilim et TURK, Nenad. Prognostic factors for survival of canine patients infected with Leptospira spp. Vet. arhiv. 2020. pp. 18. 

4. Leptospirose. Institut Pasteur. [en ligne]. 6 octobre 2015. [Consulté le 23 juillet 2022]. Disponible à l’adresse: https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/leptospirose

5. PERRIN, Michel. Vaccination contre la leptospirose : mise à jour. Abstract Vet. juin 2016. Vol. 30, pp. 6.

6. AYRAL, Florence C., BICOUT, Dominique J., PEREIRA, Helena, ARTOIS, Marc et KODJO, Angeli. Distribution of Leptospira Serogroups in Cattle Herds and Dogs in France. The American Journal of Tropical Medicine and Hygiene. 1 octobre 2014. Vol. 91, n° 4, pp. 756‑759. DOI 10.4269/ajtmh.13-0416.

7. AYRAL, F., ARTOIS, J., ZILBER, A.-L., WIDÉN, F., POUNDER, K.C., AUBERT, D., BICOUT, D. J. et ARTOIS, M. The relationship between socioeconomic indices and potentially zoonotic pathogens carried by wild Norway rats: a survey in Rhône, France (2010–2012). Epidemiology and Infection. février 2015. Vol. 143, n° 3, pp. 586‑599. DOI 10.1017/S0950268814001137.

8. DAY, M. J., HORZINEK, M. C., SCHULTZ, R. D. et SQUIRES, R. A. WSAVA Guidelines for the vaccination of dogs and cats: WSAVA Vaccination Guidelines. Journal of Small Animal Practice. janvier 2016. Vol. 57, n° 1, pp. E1‑E45. DOI 10.1111/jsap.2_12431.

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